“Sauvons la liberté, la liberté sauve le reste.”
Victor Hugo, « Choses vues », 1851.
« La Liberté guidant le peuple » a été peint par Eugène Delacroix en 1830, à l’issue des « Trois Glorieuses », les journées révolutionnaires des 27, 28 et 29 juillet, qui ont abouti au renversement du roi Charles X, qui avait, le 25 juillet 1830, publié quatre ordonnances visant à écraser l’opposition libérale: suspension de la liberté de la presse, dissolution de la Chambre des députés, réforme du suffrage censitaire favorable à l’aristocratie…
En réponse à ce coup de force, le peuple se soulève à Paris: il dresse des barricades dans les rues et affronte les forces armées. L’émeute se transforme rapidement en insurrection révolutionnaire (la première, depuis la Révolution de 1789) et, du 27 au 29 juillet, les combats font rage dans toute la capitale. Charles X fuit finalement Paris, le 30 juillet. Les députés libéraux, essentiellement monarchistes, reprennent la situation en main et optent finalement pour une « monarchie constitutionnelle ». C’est ainsi que le duc d’Orléans, Louis-Philippe 1er est proclamé « roi des Français ». Il sera renversé à l’issue des journées révolutionnaires de juin 1848.
Chez Delacroix, l’allégorie de la Liberté, c’est une fille du peuple, vivante et fougueuse, qui incarne la révolte et la victoire. Coiffée du bonnet phrygien, les mèches flottant sur la nuque, elle évoque la révolution de 1789, les sans-culottes et la souveraineté du peuple. Elle est entourée par les composantes du peuple parisien: gamins de Paris (il inspirera plus tard le personnage de Gavroche à Victor Hugo), ouvrier, artisan et, en arrière-plan, étudiants. Au fond, à droite, on aperçoit les tours de Notre-Dame.
Réaliste et novateur, le tableau fut rejeté par la critique, scandalisée par les détails morbides (pilosité sous les aisselles de la Liberté, peau laiteuse, ongles noirs, pieds sales…). Le régime de Louis-Philippe, dont il saluait l’avènement, le cacha au public.
Ce n’est qu’en 1874, sous la Troisième République qu’il entre au Louvre et qu’il est ensuite abondamment reproduit, devenant un symbole de la République et de la lutte pour la liberté.
Le street art s’en est, bien sûr, également emparé. En voici plusieurs approches.
A Besançon, esquissée.
A Paris, au bord d’un escalier, il ne reste que le gamin/Gavroche brandissant un pistolet (l’ensemble de l’escalier reproduisait tout le tableau, mais, hélas, la plus grande partie n’a pas résisté au temps).
RueMeurt D’Art a repris le personnage de Gavroche pour l’association Seuil, à Paris.
La liberté brandissant un drapeau européen et franchissant un panneau de sens interdit.
En artiste brandissant un pinceau.
Façon Play Mobil,
En miroir grossissant,
Tatouée et brandissant une kalachnikov, à Besançon.
Brandissant un drapeau ukrainien, à Paris (déjà vu dans mon article sur la solidarité avec l’Ukraine).
A Mexico, soutenant les peuples indigènes dans leur lutte.
A Paris, façon Gilets jaunes.
A Besançon, sur un fond de révoltes urbaines.
Pour en savoir plus:
- Analyse du tableau de Delacroix sur l’excellent site « L’Histoire par l’image »;
- Autres articles sur les relations entre le street art et les grands peintres: Vermeer, Rembrandt, Renoir…; Brueghel; Van Eyck; Mona Lisa; Frida Kahlo.