Cet article est dédié à Flo. B. et Michel R.
Evoquer le Mexique amène le plus souvent à évoquer têtes de mort (calaveras),
et squelettes (catrina).
Mais il faut aller au-delà du cliché et en évoquer les origines et les manifestations pour comprendre pourquoi ce qui est perçu comme morbide dans d’autres cultures, est vécu comme un symbole de vie au Mexique. Sachant que les traditions peuvent être très différentes d’un bout à l’autre du pays et que je ne peux aborder que ce que j’ai vu dans le Centre et le Sud.
Traditions millénaires et syncrétisme
Dans de nombreuses cultures préhispaniques, les âmes des défunts, à un moment de l’année, retournent dans le monde des vivants, passer un moment avec leurs proches et se nourrir des aliments qui leur sont offerts sur les autels dressés en leur honneur.
Dans le Mexique d’aujourd’hui, c’est le 1er et le 2 novembre qu’ont lieu ces retrouvailles. Afin que leurs défunts se sentent « chez eux », les familles leur dressent un autel. Les morts y sont représentés par leur image accompagnée d’objets et d’aliments qu’ils appréciaient. Abondent également des objets de décoration, sucreries (comme les calaveras, têtes de mort en sucre ; ou une espèce de brioche appelée « pan de muerto« ).
Sur l’autel, doivent figurer quatre éléments. L’eau symbolise la pureté de l’âme et permet au défunt d’étancher sa soif après son long voyage. Le sel purifie et empêche l’altération du corps dans son voyage aller-retour. Les bougies éclairent le chemin que parcourent les âmes et relient les vivants et les morts. Les fleurs, en particulier la cempasúchil (œillet d’Inde), guident les âmes grâce à leur couleur et à leur parfum entêtant.
Une grande fête populaire
La fête des morts déborde largement le cadre privé. L’espace public est décoré,
les équipements publics, les commerces, les restaurants dressent leur propre autel,
et les gens parcourent les rues avec leurs déguisements.
A Huaquechula, une rue se transforme en cimetière et les fausses tombes portent des épitaphes pleines d’humour.
La Catrina
Depuis les années 1920, elle est devenue un élément central de la Fête des Morts mexicaine (et de la culture mexicaine en général). Créée par le caricaturiste José Guadalupe Posada à la fin du XIXème siècle, elle a été popularisée par le peintre Diego Rivera, qui lui a donné ce nom. Il s’agit du squelette d’une femme souriante, avec un grand chapeau couvert de plumes d’autruche et vêtue avec élégance (d’où son nom, qui désigne en langage populaire une bourgeoise à l’élégance recherchée). On lui a ensuite ajouté son pendant masculin, el Catrín.
Depuis, la Catrina et el Catrín sont déclinés dans différents styles.
Les animaux
Trois d’entre eux jouent un rôle fondamental :
- Le colibri symbolise l’immortalité de Dieu et accompagne le défunt lorsqu’il vient rendre visite aux vivants chaque année ;
- Le chien, dans de nombreuses mythologies préhispaniques, aidait les âmes à atteindre l’Inframonde, le Mictlán ;
- Le papillon monarque incarne l’âme des morts.
C’est ainsi qu’au Mexique, la mort accompagne les vivants… et ce n’est ni sinistre, ni triste !
Pour en voir plus
Autres articles sur le Mexique dans mon blog : « Le colibri, oiseau merveilleux » « la place des femmes qui luttent » ; » les visages du mercado Juárez » ; « le massacre de Tlatelolco« .
Toujours un passionnant voyage François Régis dans la forme, la couleur, la tradition, et jusque dans l’au delà peut-être