Cet article est dédié à Margarita A. Tinki pali !
Un contexte particulier
La construction du métro de Stockholm a démarré après la seconde Guerre Mondiale et les premières stations datent des années 1950. Les travaux ont eu lieu dans un contexte particulier. Sur le plan géologique, tout d’abord : le sous-sol de la ville est principalement composé de granit, roche dont la dureté a rendu très difficiles les travaux. Sur le plan politique et social ensuite : dans la Suède sociale-démocrate de cette époque, prédominait le Folkhemmet (littéralement « Maison du Peuple »), mouvement visant à faire de la Suède une société sans obstacles de classe, un pays permettant à chacun, quelles que soient ses origines, d’accéder à l’éducation et à une carrière. Et dans cette optique, l’art (dont le design et l’architecture) devait être accessible à toutes et à tous.
Les stations de métro sont le produit direct de ce contexte.
Des cavernes
Le percement des souterrains à l’explosif engendre des parois irrégulières ? Au lieu de les masquer (comme cela s’est fait pour les stations des années 50 et 60), on les accentue au contraire : à partir de 1972, toutes les nouvelles stations ont des murs et des plafonds irréguliers, souvent sculptés pour ressembler à des formations rocheuses naturelles, avec des jeux de lumière qui renforcent cet effet de grotte ou de caverne. Cela donne une atmosphère « enveloppante ».
L’art à la portée de tous
Le métro compte 100 stations et presque toutes (90 !) sont décorées. Mais quand je parle de « décoration », il ne s’agit pas de placer quelques sculptures ou fresques : la plupart de ces stations ont été confiées à un ou plusieurs artistes (en tout, ils ont été 250) qui les ont conçues comme des œuvres d’art intégrales.
Parmi celles qui m’ont le plus impressionné, j’ai choisi 4 stations, toutes inaugurées au cours des années 1970.
T-Centralen, hommage aux ouvriers du métro
Cette station est le point nodal de tout le réseau, une gigantesque plateforme de correspondances, comme la station Chatelet à Paris. Pour les milliers d’usagers, l’artiste, Per Olof Ultvedt a choisi une couleur bleue, apaisante, avec un décor végétal.


Il a également voulu rendre hommage à tous les travailleurs qui ont joué un rôle dans la construction du réseau.






Kungsträdgården, jardin baroque
La station dessert le site de l’ancien jardin royal (Kungsträdgården). Le décor y est baroque, et chaque détail a été pensé pour symboliser un jardin. L’artiste, Ulrik Samuelson, a voulu représenter des parterres de fleurs colorés, traversés par des allées en gravier blanc. Elles sont jalonnées de statues et de colonnes, vestiges fantasmés du château de Malakös, dont dépendait le jardin. Les compositions géométriques viennent trancher sur les dessins aux couleurs chatoyantes.




La composition peinte a été complétée par un décor en céramique qui enveloppe les quais.

Solna Centrum, déforestation et exode rural
Toute la station se fond dans le vert (la forêt) et le rouge (le soleil qui se couche derrière la cime des arbres).

Mais le décor est tout sauf idyllique. Dès les années 1970, les artistes, Karl-Olov Björk et Anders Åberg dénonçaient la surexploitation forestière.
Les immenses forêts suédoises, leurs plans d’eau, leurs rivières poissonneuses, qui faisaient l’objet d’une exploitation raisonnée par des habitants vivant dans de petits villages…





… sont menacées de destruction par l’exploitation forestière industrielle, les carrières, la construction de grandes routes…






… avec leur cortège de pollutions, et d’exode rural.


Mais les animaux peuvent parfois se venger !

Tensta, hymne à la fraternité
La ville de Tensta a été construite entre 1966 et 1972 pour répondre aux besoins d’une métropole en pleine croissance et elle a accueilli (et continue à le faire) des familles nouvellement immigrées provenant du monde entier.
Les trois artistes, Helga Henschen, Arne et Lars Sedell ont voulu que la station soit accueillante pour toutes et tous, quelles que soient leurs origines. Ils ont passé plus d’un an à décorer le quai de la gare avec des animaux colorés et des feuilles stylisées sur un mur blanc. Accompagnés de poèmes et textes d’écrivains du monde entier.












Et le mot « Fraternité » est décliné dans dix langues.

Pour en savoir plus :
A propos du métro de Stockholm
Pour en voir plus :
Mon article sur une autre ville scandinave : Copenhague